Une nouvelle tendance déferle sur le monde professionnel : le « conscious quitting ». Loin d’être un simple désengagement, ce phénomène traduit une prise de conscience radicale des salariés. De plus en plus d’entre eux n’hésitent plus à claquer la porte lorsque leur emploi entre en contradiction avec leurs valeurs personnelles. Une véritable remise en cause des priorités qui bouscule les codes de l’entreprise traditionnelle.
Qu’est-ce que le conscious quitting ?
Le conscious quitting désigne le fait de démissionner consciemment d’un emploi en raison d’un désalignement entre les valeurs personnelles et celles de l’entreprise.
Un collaborateur décide ainsi de quitter son poste, non par manque de motivation ou de reconnaissance, mais parce que son travail entre en conflit avec ses convictions profondes.
À la différence du « quiet quitting » où l’on réduit son implication au strict minimum, le conscious quitting implique une prise de décision réfléchie.
Aussi, contrairement au « loud quitting » qui consiste à claquer la porte de façon spectaculaire, cette démission consciente se veut respectueuse et empreinte de sérénité.
Selon une étude du cabinet Gallup, près de 94% des salariés seraient en réalité peu ou pas du tout engagés au sein de leur entreprise…
Les raisons profondes derrière cette nouvelle tendance
Perte de sens et désalignement des valeurs au travail
De nombreux salariés, notamment les jeunes générations, aspirent désormais à exercer un métier en phase avec leurs convictions. Ils rejettent l’idée de sacrifier leurs valeurs au profit d’un emploi dénué de sens.
Ce besoin de cohérence entre vie professionnelle et personnelle devient un critère majeur.
La montée de la quête de sens et d’engagement chez les salariés
Les collaborateurs, notamment les plus jeunes générations, recherchent désormais un travail épanouissant et porteur de sens. Ils veulent s’investir dans des projets qui les passionnent et ont un impact positif sur la société.
À l’inverse, un emploi perçu comme dénué de sens ou contraire à leurs valeurs profondes engendre frustration et insatisfaction. C’est la raison pour laquelle de plus en plus d’actifs n’hésitent pas à démissionner pour retrouver un équilibre.
L’impact de l’éco-anxiété et de la crise environnementale
La prise de conscience collective des enjeux environnementaux accroît les attentes des salariés envers leur employeur.
Confrontés à l’éco-anxiété, de nombreux professionnels souhaitent travailler au sein d’entreprises éco-responsables, avec une empreinte carbone réduite.
À défaut, le « conscious quitting » devient une solution pour :
- Fuir un secteur d’activité jugé polluant ou néfaste pour la planète.
- Rejoindre une organisation plus vertueuse sur le plan environnemental.
Qui est concerné par le conscious quitting ?
Profil des actifs prêts à démissionner pour leurs valeurs
Parmi eux, on retrouve davantage de femmes, de jeunes diplômés, ainsi que des cadres supérieurs.
Tous partagent un désir profond d’alignement entre leurs valeurs personnelles et professionnelles.
Par ailleurs, les ressources issues des minorités ethniques ou de la communauté LGBTQIA+ sont particulièrement sensibles à l’inclusion et à la diversité au sein de leur entreprise.
Différences selon les générations
La génération Z, née entre 1997 et 2010, représente un vivier important de conscious quitters potentiels. Hyper-connectés et sensibilisés aux enjeux sociétaux dès le plus jeune âge, ces jeunes actifs accordent une importance capitale aux valeurs éthiques et écologiques.
Pour autant, les générations Y (millennials) et X ne sont pas en reste, portées par une quête de sens croissante au travail.
Principaux secteurs d’activité touchés
Si aucun secteur n’est épargné, le conscious quitting semble particulièrement prégnant dans :
- La tech et les start-ups (manque de diversité, objectifs financiers prédominants).
- Le conseil et l’audit (rythme effréné, manque de flexibilité).
- La finance et la banque (éthique discutable, focus sur le profit).
- Les industries polluantes (pétrole, automobile, chimie).
Au final, les entreprises aux pratiques controversées ou ne s’inscrivant pas dans une démarche RSE crédible sont les plus exposées.
Les conséquences d’un désengagement massif
Les risques en termes d’image employeur et de rétention des talents
On le comprend, le conscious quitting représente un défi de taille pour les entreprises. Outre les coûts financiers directs engendrés par les départs, elles font face à un risque majeur d’atteinte à leur marque employeur.
De fait, une vague de démissions liées à un désalignement des valeurs peut sérieusement ternir leur image auprès des candidats potentiels. Difficile alors d’attirer les meilleurs talents, qui privilégieront des structures en phase avec leurs aspirations profondes.
Par ailleurs, la rétention des collaborateurs s’annonce plus ardue. Les entreprises peineront à conserver leurs talents les plus engagés et performants, ceux-là mêmes qui incarnent au mieux leurs valeurs.
Un cercle vicieux se mettra en place : plus les départs se multiplieront, plus l’écart se creusera entre le discours affiché et la réalité vécue au quotidien par les équipes restantes. Autant dire que la spirale sera difficile à enrayer.
Impacts financiers et organisationnels
Au-delà de l’image employeur, le conscious quitting impacte lourdement les finances et l’organisation des entreprises.
Chaque départ engendre des coûts de recrutement et de formation importants, sans compter la perte de productivité inhérente aux postes vacants.
À cela s’ajoutent les dépenses pour fidéliser les collaborateurs restants, via des revalorisations salariales ou des primes de rétention.
Surtout, la fuite des talents menace la pérennité même de l’activité. Difficile en effet de maintenir un haut niveau d’expertise et de qualité lorsque les meilleurs éléments quittent la structure. Les projets stratégiques sont mis en péril, tandis que la charge de travail s’alourdit pour les équipes réduites.
Un risque de surmenage guette, avec à la clé de nouveaux départs en cascade.
entes.
Comment lutter efficacement contre le conscious quitting ?
Développer une stratégie RSE ambitieuse
Face à la montée des préoccupations sociétales et environnementales, les entreprises ne peuvent plus se contenter d’afficher de bonnes intentions. Elles doivent désormais se doter d’une véritable feuille de route RSE, ambitieuse et transparente.
Cela commence par un diagnostic approfondi de leurs impacts négatifs, économiques, sociaux et environnementaux. Sur cette base, définir des objectifs chiffrés de progrès, avec un calendrier de mise en œuvre. Par exemple, réduire les émissions de CO2 de 30% d’ici 2030 ou atteindre un taux d’emploi de personnes en situation de handicap de 6%.
Ensuite, déployer des plans d’action concrets à tous les niveaux : éco-conception des produits, verdissement de la supply chain, formation des équipes, etc. Sans oublier de communiquer régulièrement sur l’avancement de cette feuille de route, dans un souci de transparence.
Favoriser le bien-être et la qualité de vie au travail (QVT)
Outre l’alignement des valeurs, le bien-être des collaborateurs est un levier incontournable pour prévenir le désengagement. Cela passe par la mise en place d’une véritable démarche Qualité de Vie au Travail (QVT).
Celle-ci recouvre de multiples dimensions : équilibre vie pro/perso, environnement de travail stimulant, reconnaissance des efforts, autonomie dans l’organisation des missions, etc. Autant d’aspects à travailler de concert avec les équipes.
Concrètement, cela peut se traduire par :
- La flexibilité des horaires et du télétravail.
- Des formations régulières pour développer les compétences.
- La mise à disposition d’espaces de détente et de loisirs.
- Des entretiens réguliers d’écoute et de reconnaissance.
- L’accès à des services de soutien psychologique si besoin.
Bref, tout un écosystème propice à l’épanouissement professionnel et personnel.
Communiquer ouvertement sur la raison d’être et les objectifs
Enfin, une communication transparente sur la stratégie de l’entreprise est essentielle. Expliquer clairement sa raison d’être, ses valeurs fondatrices et ses ambitions à moyen/long terme.
Loin des discours marketing creux, cette transparence renforce l’adhésion des équipes.
Concrètement, cela peut passer par :
- La diffusion régulière de contenus pour présenter la vision stratégique.
- La mise en avant des réalisations et succès illustrant cette vision.
- La valorisation des collaborateurs qui incarnent au mieux ces valeurs.
L’objectif ? Donner du sens à l’action collective et permettre à chacun de se projeter dans ce projet d’entreprise. Une condition sine qua non pour fédérer durablement les talents autour d’une même ambition.
Les 3 points clés à retenir :
- Le conscious quitting reflète une quête de sens et d’alignement entre les valeurs personnelles et professionnelles, particulièrement prégnante chez les jeunes générations. Il traduit un rejet croissant des emplois perçus comme contraires à ses convictions éthiques ou environnementales.
- Outre un risque d’atteinte à leur marque employeur, les entreprises confrontées à cette vague de démissions font face à des impacts financiers et organisationnels majeurs : coûts de recrutement, perte de productivité, fragilisation des projets stratégiques.
- Pour y remédier, elles doivent repenser en profondeur leur culture d’entreprise, développer une stratégie RSE ambitieuse, favoriser le bien-être au travail et communiquer ouvertement sur leur raison d’être.